so wake me up when it's all over.

(fight club) ▽ C’est seulement quand on a tout perdu qu’on est libre de faire tout ce qu’on veut.

Exceptionnellement, j'avais accepté qu'Elise m'accompagne à l'extérieur. J'avais à peine fait deux pas dehors avec elle que je me demandais quelle mouche m'avait piquée. Bordel mais pourquoi ? Elle n'était pas vraiment chiante dans son genre. Au contraire même, elle me fichait généralement la paix, ne parlait que lorsqu'elle n'avait plus d'autres choix. Mais c'était dangereux. J'avais foutrement peur pour elle et cela, c'était une première. Pire encore, j'étais terrifié à l'idée qu'elle puisse se faire mordre sous mes yeux. Il était, bien sûr, hors de question que je laisse une telle chose se produire mais en attendant, cela signifiait que j'vais maintenant un point faible. Comme tout le monde, j'en avais déjà avant, mais je n'avais rien à perdre. Comme il l'était très bien dans le fabuleux Fight Club : "c'est seulement quand on a tout perdu qu'on est libre de faire ce qu'on veut". Or, pour ma part, j'avais déjà tout perdu quand l'invasion était survenu. La liberté, cela me connaissait plus que de raison. La survie dehors également. Et voilà que maintenant, je me retrouvais avec une gamine sur les bras, qui avait du mal à se faire à ma présence. Alors que moi, de mon côté, je ne pouvais tout simplement plus rester éloigné d'elle trop longtemps. Cette situation était incroyablement horrible, et j'aurais donné beaucoup pour retourner en arrière, à une époque où tout cela n'avait pas d'importance, quand je ne pensais qu'à sauver ma peau et à m'éclater avec les rôdeurs.

Je n'étais pas fait pour m'occuper d'une gamine. Mais elle n'avait que dix-sept ans, et j'avais tué - quoi qu'achevé serait sans doute un bien meilleur terme - son père. Elle était seule et je ne pouvais pas juste lui tourner le dos, et retourner faire ce que je savais le mieux faire : fuir. Mais tout cela était impensable. Je ne pouvais pas. Tout simplement. Et je ne pouvais pas non plus la laisser moisir dans la zone, et me permettre de partir comme si tout cela n'avait pas d'importance à mes yeux. Parce que cela en avait. La savoir en sécurité aurait pu me suffire, mais ce n'était pas le cas. Je savais qu'elle avait beaucoup de mal avec l'idée de m'adresser la parole, mais aussi qu'elle adorait aller dans des centres commerciaux totalement vides pour chercher tout ce dont elle pouvait avoir besoin. C'était dangereux et j'en avais conscience mieux que beaucoup, mais c'était aussi plus fort que moi : je ne pouvais que céder à ses requêtes, aussi farfelues soient-elles. Avec un peu de chance, nous n'allions pas croiser le moindre rôdeur, même si je n'avais que peu d'espoir à ce niveau-là. Au final, ce qui m'inquiétait le plus, c'étaient les survivants. Les quelques personnes qui n'avaient pas voulu aller dans s'enfermer dans la zone, et qui préféraient traîner autour. Ils étaient dangereux plus que les zombies, et c'était ce qui m'effrayait, me faisait stresser comme jamais, même.

J'avais beau avoir mon fidèle nunchaku, une arme bel et bien chargée dans mon holster, et même un hachoir dans mon autre main, j'avais peur de ce qui nous attendait dans le magasin dans lequel nous venions tout juste de pénétrer. Je tournai la tête en direction de ma voiture garée un peu plus loin, avant de poser mon regard sur Elise. « Rappelle-toi, tu n'hésites surtout pas à utiliser ton couteau si tu croises un rôdeur, mais si je suis là, tu me laisses faire. Si on croise des survivants, tu te caches et tu me laisses m'occuper de ça. C'est clair ? », lui demandai-je sur un ton sans doute un peu autoritaire, mais j'estimais que c'était nécessaire. Je ne pouvais rien laisser au hasard, pas maintenant alors que j'avais la vie de quelqu'un d'autre entre mes mains. Une personne à laquelle je tenais, pour couronner le tout. « Si quelque chose tourne mal pour moi, tu vas dans la voiture et tu retournes dans la zone, ok ? », ajoutai-je presque aussitôt avant de m'avancer le premier dans l'entrée de la grande surface. Pour l'instant, je n'entendais pas le moindre bruit à l'intérieur, et c'était rassurant. Mais je préférais prendre mon temps, y aller doucement - nous avions toute l'après-midi après tout -, pour ne pas prendre de risques inconsidérés et inutiles.

(c) AMIANTE