Noah & Auregan

RUN BOY RUN ! THIS WORLD IS NOT MADE FOR YOU. RUN BOY RUN ! THEY'RE TRYING TO CATCH YOU.

Il l'entend. Il la sent. Mais Noah ne parvient pas à exaucer ses implorations. Garder les yeux ouverts devient bien trop difficile pour lui. Il inspire longuement, expire et sent sa conscience s'évanouir dans les limbes. La voix de la rouquine lui parvient par brides uniquement, comme parvenue du bout d'un tunnel. C'est bien plus agréable d'être spectateur que d'avoir à subir la douleur. Mais c'est la fatigue qui parle. C'est l'épuisement psychologique qui lui laisse un arrière goût de défaite. C'est la peur et l'angoisse qu'il camoufle . C'est l'espoir brisé d'un homme bousillé. Non, pas cette fois, pas comme ça. Avant même qu'il n'est le temps de lâcher un cri de rage, quelque chose de moue pénètre sa bouche. Ca l'assèche et ça râpe les papilles. Du tissu. Noah ouvre brusquement ses paupières, avisant les sommets d'arbres qui l'entourent. Ils l'encerclent. La chaleur monte et il a l'impression d'être en feu. Foutue fièvre. Un grognement sourd est lâché, à défaut de pouvoir prononcer des mots. C'est à peine s'il ose baisser les yeux. Comment Auregan compte-t-elle le charcuter ? Sûrement avec ce qu'elle a dans son sac, ces matériaux rudimentaires mais utiles en cas de blessures plus ou moins grave. Il n'y a qu'un moyen efficace pour désinfecter et cautériser une plaie … Ses narines crachent et ravalent l'air tandis qu'il fixe obstinément le ciel tout en s'agrippant fermement au sol. Ses doigts s'enfoncent dans la terre, qui elle même s'engouffre dans ses ongles. Hors de question d'aller blesser Auregan en lui broyant le bras.

Les premiers assauts bienveillants mais ô combien douloureux lui arrachent un tremblement brutal. Il croit même entendre des voix et voir des silhouettes. Peut-être bien qu'il délire.

« - … va … en .. ? »  «  .. Oah .. »

Des gens. Des voix qu'il doute de connaître. Peut-être que si, peut-être que non. Il n'en sait rien. Tout arrive par bride. Il ne cesse de divaguer, entre les songes et l'éveil. Les black-out et les flash-light. Lumière, ténèbres. Jour. Nuit. Inconscience. Éveil.

Trou noir.
Oubli.
Un cri.
Le sien.

Noah se redresse brutalement, sentant la sueur perler sur sa chair et son front. Les draps tombent de son buste redressé et le frisson lui arrache un soubresaut frigorifié. Où il est ?

- Aurie … balbutie difficilement le survivant, la gorge sèche et râpeuse. La voix trop rauque et basse. AUREGAN ! » Qu'il beugle plus nerveusement.

Il devine les toiles de tante. Pas la leur. Une autre. Yosemite ? Il l'ignore mais ne compte pas rester là, les bras ballants. Il s'en souvient, maintenant. Il y avait des gens avec elle. Amis ou ennemis ? La seconde option lui glace le sang. Il jure entre ses dents, retire les draps complètement et découvre le bandage enroulant son bas ventre. Encore une putain de cicatrice à ajouter au tableau. Le blond se lève difficilement, découvrant qu'il n'est plus qu'en caleçon. Il est forcément à Yosemite …
 

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Noah & Auregan

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Elle suffoque, elle aussi. A l'image de Noah, elle a du mal à respirer. Mais ce n'est pas la même chose qui provoque cette impression, ce n'est pas non plus le même contrôle qu'ils ont là-dessus. Au visage de Noah, Auregan comprend qu'il divague complètement, qu'il n'a sans doute même plus conscience de tout ce qui est en train de se passer. Plutôt que de le regarder trop longtemps et de s'inquiéter pour son sort, elle fait ce qu'elle sait le mieux faire : le soigner. Essayer, du moins. Mais ce essayer, elle veut le rayer de son vocabulaire. Au moins le temps que durera cette ... Cette opération improvisée. Elle n'a pas le choix, il faut qu'elle s'y mette. Au plus vite. Elle ferme les yeux cinq secondes, le temps de prendre une profonde inspiration et de redevenir maîtresse d'elle-même. Elle peut le faire. Bien sûr qu'elle peut le faire.

Elle se penche de nouveau, et entreprend de nettoyer la plaie de Noah. Ses mains ne sont pas extraordinairement propres alors elle évite autant que possible d'y toucher. Le tout nettoyé, elle s'apprête à récupérer une aiguille et du fil, quand une voix l'interrompt. « Heathcliff, j'ai entendu un ... » Sa voix s'éteint quand il fait le trajet entre les mains d'Auregan et le torse de Noah, juste en-dessous. « ... coup de feu. »
La surprise est de mise, mais il se reprend vite. La rousse ne le regarde même pas, mais elle a déjà posé son fil et son aiguille. Elle sait déjà ce qui va se passer ensuite. Alors elle remet un bout de tissu sur la plaie, faisant office de compresse. Elle retire aussi celui qu'elle avait mis dans la bouche de Noah.

Cette fois, c'est bon.

Le blond, à quelques pas de là, ancien infirmier, siffle. Fort. Ça ne réveille pas Noah, et Auregan s'en inquiète. Elle la sent, ça y est. La panique est en train de la gagner. Plus qu'elle ne s'y serait jamais autorisée en temps normal. Mais rien n'est normal dans tout ça. Rien. Ce n'est pas un champ de guerre qu'elle maîtrise. Ce n'est pas une journée comme les autres passée sur le front. C'était, oui c'était une journée comme les autres passée avec Noah. A Yosemite, où ils sont supposés être en sécurité. Et leur discussion lui revient par bribes. « La balle l'a traversé. Il faut le nettoyer, et le recoudre. Il faudrait aussi le transfuser, il a perdu beaucoup de sang. Assez rapidement, il est inconscient depuis un moment et ça ne signifie rien de bon. » Réussit-elle à dire avant de, elle aussi, se laisser sombrer dans la folie passagère.

Elle voit flou, quand des types débarquent à leur tour et entreprennent d'embarquer Noah jusqu'à "l'infirmerie". On la repousse, on l'empêche de les suivre.
Et on fait bien, sans doute.

Dans un coin, à proximité de la tente où ils sont en train de s'occuper de Noah sans lui avoir demandé son avis, elle se laisse aller à quelques larmes, à quelques grognements de rage. Tant et si bien qu'elle est totalement remise, quand on vient lui dire que Noah se repose, qu'il va bien, qu'il va aller on ne peut mieux. Enfin, ça n'arrange pas le cœur du problème : qui a tiré cette balle et pourquoi ? Était-ce un accident ? Ou un acte tout à fait volontaire ? Décidant d'y réfléchir sans pour autant s'éloigner de Noah, Auregan s'assoit à même le sol à proximité de la tente où il dort. Et il a plutôt intérêt à ne pas être trop long avant de se réveiller, ou elle ne répond plus de rien.

Quand il lui semble entendre du mouvement dans la tente, elle tourne brusquement la tête. Derrière la toile, elle devine la silhouette de Noah. Debout. Bordel. Furibonde, elle s'y précipite et se retrouve nez-à-nez avec lui. « Allonge-toi. » Oups, elle devrait peut-être être plus douce ? Et bien non ! Qu'est-ce qu'il fout debout ?! « Tu as perdu beaucoup de sang, et ils sont encore en train de chercher quelqu'un de ton groupe sanguin. Alors tu t'allonges, et tu arrêtes de t'agiter. S'il te plaît. » Elle essaye de se faire plus douce, mais c'est difficile. Il lui a fait une peur bleue, ça l'excuse de tout, non ?
 

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Faut bien l'avouer. Depuis le temps, y a un repaire qu'il s'est fixé. Toujours le même. Et il a la forme d'une rousse a l'air souvent bougon. Noah inspire longuement, grimaçant de douleur et boitillant jusqu'à l'entrée de la tente. Il a besoin de comprendre ce qu'il fout ici et tout de suite. Est-il à Yosemite ? Il l'espère sincèrement, sinon … le blond fronce les sourcils alors qu'une ombre grossit derrière le voile de la tante. Et un soupire de soulagement crève entre ses babines sèches alors qu'Auregan déboule en trombe, l'air furibond. Ca, c'est bien sa rousse. L'ordre qu'elle lui aboie et sec et autoritaire. Courroucé. Contrarié.

« - Bonjour à toi aussi ! Qu'il lance avec humeur.

En vérité, il est tellement soulagé qu'il pourrait s'effondrer pour dormir à même le sol. C'est étrange, peut-être qu'ils l'ont drogué aux médocs pour abréger la douleur. Mais il plane, incapable de se vexer de la voir si intransigeante plutôt que soulagée de le voir sur pieds. C'est Auregan, c'est comme ça qu'elle fait. Et justement. Qu'importe la réponse qu'elle lui apportera. Un oui, un non. Ca, c'est eux quoi qu'il arrive. Un putain de bonne équipe. Tout simplement. Un sourire apparaît au coin de ses lèvres, il courbe l'échine et le blond approche de la jeune femme pour déposer un baiser chaste sur ses lèvres.

- Bien m'dame, fait-il doucement en caressant furtivement sa joue.

Il s'en fait pas pour lui. D'ailleurs, il est entre de bonnes mains. Tout le monde l'est, quand elle est là. Elle peut sûrement lire dans son regard toute la possessivité dont il est capable. Bordel, il est tellement fier d'elle. Et qu'importe sa réponse, il compte pas la laisser à qui que ce soit ou laisser tomber facilement.

- Je te confie mes gardes pendant ma convalescence, » murmure Noah en laissant retomber sa main, l'autre toujours posée sur son abdomen.

Et pour une fois, il obéit sans rechigner, allant s'effondrer difficilement sur la couche de draps étrangement propres.
Et à Morphée de le reprendre aussi vite qu'il l'a rejeté.
 

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Bien sûr qu'elle se montre intransigeante, et même tranchante. Elle s'inquiète pour lui, Auregan. Et c'est sa manière à elle de l'exprimer, de le mettre en avant. Elle n'a pas envie de le voir prendre des risques inconsidérés alors qu'il vient d'échapper de peu à la mort. Ça y est, elle peut le dire maintenant, le mot maudit. Maintenant qu'il est tiré d'affaire et qu'ils sont tous les deux en sécurité.

Elle se glisse dans la tente et lui ordonne de se rallonger. La réaction de Noah réussit à lui arracher un sourire. Un unique et subtile sourire, mais il est là. Parce que le soulagement, elle peut le sentir à présent.
Au cours de ces dernières heures, elle est passée par toutes les couleurs possibles et imaginables. Un véritable ascenseur émotionnel dont elle est enfin descendue.

Il pose un baiser délicat sur ses lèvres, avant de s'exécuter. Bien.
« Ne t'inquiète pas, je n'ai pas l'intention d'aller où que ce soit. » Ça y est, elle est fin prête à le rassurer. Parce qu'il s'est rallongé, et qu'il s'est décidé à baisser les armes. Enfin. Elle le voit se rendormir et ce n'est que là qu'elle se décide à se poser elle aussi.

Elle ne fait que s'asseoir, dans un coin de la tente où elle peut le voir sans difficulté aucune. Elle va veiller sur lui, posée juste là. Et elle ne le lâche d'ailleurs pas du regard une seule seconde. Elle se décide juste à bouger quand elle devine, à la sueur de son front notamment, qu'il a de la fièvre.
Elle ressort de la tente, récupère un bout de tissu qu'elle imbibe d'eau récupérée un peu plus tôt, et retourne à son chevet. Elle plie le tissu et le pose sur son front. Là, ça devrait le rafraîchir et lui permettre de se reposer véritablement.

En attendant, elle, elle va rester là. Et attendre sagement. Elle pourrait trouver bien d'autres occupations mais c'est ici qu'elle veut être. Ici, et seulement ici.
 

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