ALICYA & TYBALT

Voilà deux jours que j’ai mis les pieds dans l’Etat du Nevada. Enfin de nos jours il n’y a plus vraiment de frontières. Dire que j’en ai parcouru du chemin ces dernières années… Mon périple a commencé il y’a 4 ans à Chicago, pour arriver ici dans l’ouest du pays, a plus de 3000 km de mon chez moi. Et encore mon parcours n’est pas fini. C’est seulement une étape pour atteindre la Californie. Dire qu’avant, il fallait seulement quelques heures en avion pour parcourir cette distance. Aujourd’hui ça prend des mois, des années. Oh bien sur si j’avais tracé d’une traite en bagnole je serais certainement arrivée plus tôt, mais c’est juste impossible. La plupart des grands axes sont impraticables car des voitures sont laissées à l’abandon partout. Et puis on fait beaucoup beaucoup de rencontres fortuites sur le chemin. Sans parler qu’il est de plus en plus compliqué de trouver de l’essence. Je ne vous dis pas la distance que j’ai parcouru à pied. Bref, aujourd’hui je suis là. J’ai établi mon campement dans une maison assez isolée.  J’ai dû nettoyer les lieux avant, car il semblerait que les propriétaires n’avaient jamais quitté la propriété. Je les ai retrouvés pendu dans le salon. Une triste scène qu’il m’est arrivé souvent de rencontrer. Beaucoup n’ont plus la force nécessaire pour continuer et préfèrent quitter ce monde. Mais bon merde quitte à se tuer, autant s’exploser la cervelle, ça éviterait de se transformer en ces choses. J’ai pris le temps de les enterrer dans le jardin, côte à côte. Je leur ai même fait des petites croix, en gravant leur nom dessus, que j’ai pu retrouver grâce à leurs papiers. Un couple de quinquagénaires. Puis je suis partie à la chasse. Car il faut bien que je me nourrisse, et que mes réserves s’épuisent. Je mets des pièges en place. J’ai réussi à choper un lapin, j’ai sa dépouille en bandoulière lorsque j’entends des bruits de pas.
Tous mes sens sont en alertes. Clairement, cela va trop vite pour que ça soit un rodeur. Soit c’est un animal sauvage, ce qui m’intéresserait grandement, soit c’est une personne qui court. Je regarde avec le viseur de mon fusil. Pour apercevoir une silhouette grimper à un arbre. Clairement, il n’a rien d’un zombie. Ils ne sont pas assez intelligents pour aller se faufiler là haut. L’homme est de dos, de sorte que je ne vois pas son visage. Tout ce que je peux dire, c’est que c’est un homme blanc. A quoi il joue ? Il est à l’affut pour me sauter dessus lorsque j’arriverais à sa hauteur ? Ou alors il se prend pour Tarzan ? Je ne sais pas, mais je compte bien le déloger de la. Je n’ai pas envie de découvrir ce qu’il me réserve, je préfère prendre les devants. Immobile, je le tiens en joue. Je m’applique. Il doit bien être à 100m de distance, mais ce n’est pas ça qui va m’arrêter. Je décale un peu sur la droite, et je tire, sans hésiter. Le coup fait mouche. La balle vient s’incruster dans le tronc d’arbre, à seulement quelques centimètres de la tête du bonhomme. Il a du avoir les oreilles qui sifflent. J’utilise un silencieux, donc ça ne doit pas alerter les zombies aux alentours. « Si tu ne sors pas immédiatement de ta cachette, la prochaine elle est pour ton crâne. Et crois moi, je ne rate jamais ma cible. » Tant mieux pour lui, parce que si j’avais loupé tout à l’heure, il aurait déjà le cerveau en compote. Mais c’est à ce point que je suis sure de moi. « Et une fois en bas, je veux voir tes mains. » qu’il ne me la fasse pas à l’envers, je l’ai à l’œil.  

(c) AMIANTE

ALICYA & TYBALT

La personne semble hésiter. C’est qu’elle prend son temps pour s’exécuter dites-moi. Et elle n’a pas l’air très obéissante en plus. J'ai l'impression que dans les deux cas, je vais me faire buter. A l’entente de cette voix, j’ai un pincement au cœur. P’tain elle ressemble terriblement à celle d’une personne que je connais. Mais je sais très bien que ce n’est pas possible. Et puis de toute façon, beaucoup de personnes ont des voix similaires. Alors je chasse très vite ces pensées de ma tête, qui n’ont rien à faire là. Ce n’est clairement pas le moment. Je dois restée concentrée. Et je n'ai pas non plus envie de prendre le risque de perdre le peu de trucs que j'ai sur moi. Alors quoi, il compte rester perché sur sa branche durant des heures ? Il a conscience que là, il est bloqué ? Et que sa seule chance de survie, c’est de m’obéir ? La seule arme que j'ai, c'est une putain de machette. Je ne représente aucun danger. Il est sérieux ? C’est censé me rassurer ces propos là ? Oh bah d’accord, dans ce cas, je lache mon arme, tout va bien, t’es inoffensif. Puis une machette, qu’est ce que ça peut faire ? Une petite coupure, rien de plus. « Si tu savais le nombre de fois que j’ai entendu ça. » Je ne représente aucun danger. La bonne blague. Je me suis suffisamment fait avoir par le passé, pour ne pas retomber dans le panneau aussi facilement. Alors il va falloir qu’il fasse mieux. « Jette là par terre alors, et descends. Je ne te le redirais pas deux fois. Je ne suis pas une fille très patiente. » Il ne me connait pas donc il ne peut pas le savoir, mais ouais, vaut mieux pas jouer avec moi. « Et puis si j’avais voulu te tuer tu serais déjà mort à l’heure qu’il est, et j’aurais pu te dépouiller sans problèmes. » Ce n’était pas un tir raté, qu’il le sache. Puis franchement j’en ai rien à foutre de ses affaires, qu’est ce que tu veux que je fasse d’une machette. Je suis suffisamment équipée comme ça. Bon sauf s’il se balade avec du chocolat là c’est possible que je devienne violente. « Je commence à croire que j’ai affaire à une mauviette. » Titiller sa fierté masculine peut être que ça marchera. En attendant, pour filer directement se cacher dans les branches, c’est que clairement il doit manquer de courage le bonhomme.  

(c) AMIANTE

ALICYA & TYBALT

Moi je suis très patient. Je pourrais rester là pendant des heures. Mais c’est qu’il serait en train de me provoquer. La vérité, c’est que je peux être très patiente aussi. Mais ça dépend pour quoi. Pour la chasse par exemple, je le suis. Ça peut parfois prendre plusieurs heures avant d’attraper une proie. Mais là dans la situation actuelle, non, j’ai très peu de patience. Et là avec son attitude il est en train de me gonfler.  Si tu comptes pas juste me dépouiller, pourquoi tu te barres pas de ton côté ? Je vois très bien ce qu’il est en train d’essayer de faire. Gagner du temps. Mais pourquoi faire ? Franchement il n’a pas grande issue possible. A moins qu’il ne sache voler et qu’il compte fuir par les airs tel un oiseau, ou superman. Bien qu’il y’a quelques années de ça, jamais je n’aurais cru possible que les morts puissent revenir parmi nous, je ne pense pas qu’on en soit encore à découvrir des gens avec des pouvoirs surnaturels. Manquerait plus que ça. « Ecoute, je n’ai pas à me justifier, ferme là et descend. » Merde, c’est moi qui ai le flingue, qu’il écoute sans broncher. Je ne vais pas juste continuer ma route tranquillement. Je ne connais pas ses intentions. Il pourrait très bien décider de me suivre et de s’en prendre à moi par la suite. D’autant que j’ai établis mes pénates non loin d’ici. Alicya ? P’tain, il me cloue sur place. Entendre mon prénom était bien la dernière chose à laquelle je m’attendais. Mais je me refuse à croire que c’est lui. Non, c’est impossible. Quelles sont les probabilités que je rencontre mon ex, par hasard, dans le trou du cul du monde du Nevada ? Cela me semble inconcevable. Je ne sais pas, ce type m’a suivi, ce n’est pas possible. J’ai dû déjà le rencontrer ces dernières années, je ne vois pas d’autres solutions. Mais résultat des courses, je suis d’autant plus méfiante. Et à la fois complètement troublée, parce qu’une petite partie de moi se dit que c’est lui. Qu’il y’a trop de ressemblances. La voix. Son intonation. La façon de prononcer mon prénom. Mais je n’ai pas envie d’y croire. « P’tain, comment tu connais mon prénom ? » Autant vous dire que je suis d’autant plus au taquet sur mon arme. A travers mon viseur, je vois les branchages bouger, j’aperçois vaguement un profil, p’tain, c’est que ça pourrait coller… Si c'est bien toi, je sais que t'as un tas de bonnes raisons de vouloir me buter. Mais si tu pouvais éviter d'avoir le doigt qui te démange de trop, ça m'arrangerait. Je tiens à rester en vie, pour des raisons que j'ignore moi même. Même si je n’ai pas envie de me l’avouer, là je crois qu’il n’y a plus aucuns doutes possibles. Ma main maintenant n’est plus du tout autant assurée que tout à l’heure, elle tremble même. Il pourrait en profiter pour tenter un mouv, car je pourrais le rater. Je reste sans voix, je dis plus rien. Je vois une machette tomber de l’arbre. Puis ça s’agit dans l’arbre. J’ai arrêté de regarder à travers le viseur, bien que mon arme soit toujours pointée vers l’homme. Ses pieds viennent trouver finalement le sol, il lève les bras en l’air…et surtout relève la tête. Mon cœur manque de s’arrêter. Mon dieu c’est bien lui. « Tybalt. » C’est tout ce que je trouve à dire pour l’heure. Je le vise toujours avec mon fusil. Et là, je me demande de quoi j’ai l’air, avec la carcasse de mon lapin en bandoulière, les cheveux attachés à l’arrache, peut être même de la terre sur le visage. Mais merde, t’es complètement conne ma pauvre fille ?! Pourquoi tu penses à ça ? Ridicule. Le choc de la surprise passée, je me reprends. « Je ne t’imaginais pas survivre à tout ça. » Ouais, je pensais qu’il servait depuis longtemps d’engrais pour les plantes. J’aurais même cru qu’il serait l’un des premiers à clamser. Jamais je ne me serais imaginé le revoir un jour. Et malgré qu’on se soit quittés en très mauvais termes, je dois avouer être p’tain d’heureuse de le voir là en vie devant moi. Bien que ça ne se ressente absolument pas dans mon comportement. « Je devrais peut être te buter là tout de suite finalement. »   

(c) AMIANTE

ALICYA & TYBALT

Tybalt. La dernière personne à laquelle je m’attendais à revoir. Probablement le seul homme que j’ai jamais aimé. Mais aussi que je n’ai jamais autant détesté. Une chose est sure, avec lui, cela a toujours été passionnel. Et dans l’excès. Que ça soit dans l’amour comme dans la haine. Il n’y a pas de demi mesure. Je serais bien incapable de savoir ce qu’il pense à l’heure actuelle. Ce qu’il ressent en me voyant aujourd’hui. Je ne peux pas me baser uniquement sur ses réactions extérieures. Car je suis bien placée pour savoir que cela ne reflète pas nécessairement notre pensée. La preuve étant que bien que j’ai l’air d’être à des années lumières heureuse de le revoir, dans le fond, je le suis. Il est un bout de mon passé, de mon histoire, et plus le temps passe, plus j’ai l’impression qu’il s’efface, et me perdre complètement. Je lui exprime mon étonnement à le voir en vie. Qu’on se le dise, je n’aurais pas parié un copeck sur sa survie. De nous deux, clairement, j’étais celle la plus taillée pour m’en sortir. Ne serait ce que par les enseignements de mon père. Qui m’a apprit la survie. Me servir d’une arme. Chasser. Pêcher. Me débrouiller seule. Ne jamais rien prendre pour acquis. C’est limite à se demander si au final il savait ce qui allait arriver et qu’il m’avait préparé pour ce moment. Même si parfois j’ai pu le détester de me faire subir tout ça, autant dire qu’aujourd’hui je ne le remercierais jamais assez. C’est en très grande partie grâce à lui si je suis encore en vie aujourd’hui. Mais Tybalt lui ? Plutôt du genre à être chouchouté. Dépendre des autres pour beaucoup de choses. Alors que toi, c'est pas surprenant du tout ... T'es pire qu'avant. Crétin. Il en a déduit ça en me voyant depuis deux minutes ? Peut être bien que je devrais le buter, ouais. Je t'en prie. Mais c’est qu’il me défierait en plus. Tout à l’heure il n’a pas avoué n’avoir aucunement envie de mourir ? Parce que là on dirait pas. « Me tente pas. » Quelques secondes de plus, et finalement, je baisse mon arme, et la range en bandoulière dans mon dos. « T’as de la chance, je n’ai pas envie de gâcher une munition de plus pour toi. » Une, c’est déjà trop. Les munitions, ça court pas les rues, alors vaut mieux les réserver de meilleures manières. De toute façon dans le fond, il ne risque rien. Je peux être violente certes – il le sait – mais pas au point d’aller jusqu’à le tuer de sang froid. Ceci dit, depuis l’invasion, tout le monde a changé, alors il ne sait pas à quel point je peux être différente. Qui ne lui dit pas que je suis devenue une sociopathe qui tue les gens qu’elle croise sans hésitations ? « T’es tout seul, ou y’a un groupe qui t’attend ? »  que je l’interroge. Est-ce que c’est un loup solitaire ou il se déplace en meute ? Là à priori il est tout seul, mais ça ne veut pas dire que des gens ne l’attendent pas un peu plus loin, ou qu’il fait parti d’un groupe de survivant. D’un campement bien établi. Même les survivants qui sont en constant mouvement, généralement, quand je les croise sur ma route, ils sont à plusieurs. C’est plus rare de tomber sur des gens comme moi, qui préfèrent se la jouer solo. Car c’est forcément plus dangereux. Je ne peux compter que sur moi-même. Je n’ai personne pour me protéger. Et dans le monde d'aujourd'hui c'est probablement complètement inconscient de ma part. Mais de mon point de vue, ce sont les hommes les plus dangereux, pas les zombies.

(c) AMIANTE

ALICYA & TYBALT

Trop de chance ... Je ne vais pas le tuer, mais peut être juste une balle dans le pied, ou l’épaule non ? Ce n’est pas grand-chose, il s’en sortira. C’est une idée que je garde dans un petit coin de ma tête, alors que je le regarde récupérer sa machette. Je ne m’y oppose pas, le laissant faire. Je ne vais pas le priver de sa seule arme de défense, je ne suis pas cruelle à ce point. Puis bon je doute qu’il va s’en servir pour m’attaquer. Ou alors c’est que le mec a vraiment pété un câble. Manquerait plus qu’il soit devenu cannibale, comme certains. Je cherche alors à savoir s’il se déplace seul. C’est que je ne peux m’empêcher d’être méfiante. Ça se trouve à tout moment, ses potes vont débarquer et m’encercler. C’est que je me balade avec un équipement qui peut faire des jaloux. J’ai pas mal de munition, ce fusil de sniper… Autant dire que par le passé, on a déjà tenté de me le dérober. Et certains ont payé le prix fort. Je voyage juste avec deux personnes. Je constate qu’il reste quand même très vague. Surement méfiant. C’est fou ce que le monde est devenu. A se méfier de tout et tout le monde. La confiance de nos jours est quelque chose de très rare. Surtout pour moi.   « Tu leur fais confiance ? » que je lui demande. Moi aussi par le passé j’ai voyagé avec des gens. Mais ça ne m’a jamais vraiment réussi. Soit ils ont fini par se faire tuer, soit ils m’ont trahis.  Je te pose pas la question. Je suppose que t'es seule depuis longtemps. Que tu t'attardes pas auprès des autres. Quand tu ne les bute pas, bien sûr. Mais quel enfoiré. C’est limite vexant qu’il suppose ça immédiatement. Mais ça m’énerve surtout qu’il ait raison en fait. Et à la vérité, ne croyez pas que ça me plaise de voyager seule. C’est pesant. Parfois, pour tout avouer, je me mets à parler toute seule. A me faire la conversation. Ou à discuter avec une plante. Même les zombies parfois… Mais non je ne suis pas folle. « Qu’est ce que t’en sais ? J’ai bien plus à apporter que toi dans un groupe. » Je serais utile. Franchement, n’importe qui devrait rêver de m’avoir parmi eux. Bon d’accord, à côté de ça, il faut supporter mon caractère… Mais c’est un petit prix à payer pour être en sécurité non ? Je pense être quelqu’un digne de confiance malgré tout. Le problème c’est qu’il faut que ça marche dans les deux sens, et comme je me méfie de tout le monde…  « Mais ouais, je suis seule. » que j’avoue finalement, même si ça m’écorche de lui donner raison. Dans le fond, cela ne change pas vraiment de la vie d’avant…  Depuis la mort de mon père durant mon enfance, je me suis toujours plus ou moins sentie seule. Notre mère qui craque psychologiquement et nous abandonne sans le vouloir, mon frère avec qui je n’ai aucunes affinités et qui s’est barré à la première occasion venue. Et je n’ai jamais eu vraiment beaucoup d’amis. Plein de gens avec qui faire la fête ouais. Mais de vrais amis, des gens sur qui tu peux compter, très peu. Quant à mes relations amoureuses…chaotiques. Tybalt en est la preuve vivante. Bien que fut un temps je le considérais comme ma famille. Mon tout. « Je me porte mieux ainsi. Personne pour me décevoir. » C’est ce dont j’essaie de me convaincre en tout cas.

(c) AMIANTE

ALICYA & TYBALT

Je lui demande s’il fait confiance à ses compagnons de route. Est-ce que ce sont des gens rencontrés sur le chemin ? Ou alors des proches ? Des personnes avec qui il est depuis le début de toute cette merde ? C'est Leandro. Je peux lui faire confiance, oui. Leandro. L’un de ses frères. Plus âgé. Je l’ai toujours apprécié, et respecté. Je l’enviais même. Sa vie de couple, sa famille. Il avait l’air de vivre le parfait amour avec sa femme et il avait d’adorables filles. Je suis contente d’apprendre qu’il est toujours en vie. Je me demande ce qu’il en est pour le reste de sa famille. Mais si a priori ils voyagent à trois, c’est de mauvais augure. Quant au reste de leur fratrie, j’imagine qu’il y’a du avoir des pertes. Il ne peut quand même pas être chanceux au point d’avoir encore tout le monde. Après je dois l’avouer, il y’en a certains que je ne pouvais pas blairer, et ils me le rendaient bien. Faut dire que généralement, soit on m’adore, soit on me déteste, mais y’a rarement un juste milieu. Au moins je ne laisse pas indifférente. « Je suis contente de savoir qu’il est encore en vie. » Sincèrement. Et de savoir qu’il n’est pas tout seul. Qu’il peut compter sur lui. Mais ça je ne le dirais pas. « T’as de la chance de l’avoir. » J’espère qu’il s’en rend compte. Même si je n’ai jamais été proche de mon frère, même si j’ai pu le détester par moments, qu’est ce que je ne donnerais pas pour l’avoir auprès de moi aujourd’hui. Malheureusement il est probablement mort  l’heure qu’il est. Et même si par chance il était encore en vie, maintenant qu’il n’y a plus le moindre moyen de communication, cela serait quasi mission impossible de le retrouver.
Je lui confie voyager seule. Arguant que je me porte mieux ainsi. Il déclare que c’est plus dangereux de voyager seul. Qu’est ce que ça peut lui faire ? S’inquiéterait-il de mon sort ? « Peut être. Mais jusqu’ici je m’en suis plutôt bien sortie. » Et je compte bien que cela continue. « Alors qu’en groupe, ça ne se finit jamais bien. » J’ai remarqué qu’il s’est empressé de déclarer qu’il n’en avait rien à foutre de toute manière. Mouais. « Je suis sure que je t’ai manqué. » Il peut l'avouer, on est tout seul, il n'y a pas de public.

(c) AMIANTE

ALICYA & TYBALT

Ca ne fait pas longtemps qu'on s'est recroisés. Ah oui ? Et bien il est d’autant plus chanceux alors s’il a réussi à retrouver un parent vivant après tout ce temps. Du coup ça me laisse de l’espoir. Et pourquoi pas ? Peut être que mon frère est toujours en vie. D’accord, il n’est pas l’archétype du survivant. Il a toujours été plutôt du genre chochotte à vrai dire. Fallait pas trop le bousculer. Mais regardez, Tybalt, alors que je lui donnais peu de chance de survie, est en chair et en os devant moi. Donc l’espoir est permis. Si jamais il est tombé sur un bon groupe, qui a pu le protéger. Après tout, il n’y a pas que des personnes mauvaises et mal intentionnées dans ce bas monde, même si j’ai plus tendance à les croiser sur ma route. Ou peut être que c’est juste moi qui les attire.
Je déclare alors être persuadée de lui avoir manqué. Sa première réaction est de rigoler. C’est quand même quelque peu vexant. Je ne vois pas ce qu’il y’a de drôle là dedans. J’ai envie de croire que tout ceci n’est que pure comédie, simplement pour cacher ses réels sentiments. Que je lui ai réellement manqué. Que j’ai toujours été dans un petit coin de son cœur. Mais ça serait surement me voiler la face. Il est très probable même que ça fait un bail qu’il n’ait plus jamais repensé à moi en fait. D’ailleurs comme il le fait remarquer, ça fait un paquet d’années qu’on s’est séparés. 6 ans au total. Bien avant tout ça. Mais et alors ? Cela ne change rien. « Et alors ? On n’oublie jamais son meilleur coup. » Un instant, j’ai failli dire l’amour de sa vie, mais dieu merci je me rattrape à temps. Même si cela n’aurait pas voulu dire qu’il est l’amour de ma vie, mais que je suis le sien. Parce que je le suis ça va de soit, n’est ce pas ? Mais en tout cas, ma remarque, c’est quand même plus représentatif de moi, que de parler de sentiments et autre. C’est alors que Tybalt se montre bien pressant à se débarrasser de moi. Apparemment il a mieux à faire, alors il voudrait tracer sa route. Même si je ne le montre pas, ses propos me blessent. Après tout ce temps sans s’être vu…Après découvrir que je suis toujours en vie… La première chose qu’il veut faire c’est se casser ? Bon c’était sympa tout ça, mais j’ai mieux à faire hein, alors salut ! A une prochaine peut être, si tu clamses pas avant. C’est tout ce que je lui inspire franchement ? Même si comme moi, il ne le montre pas, je pensais qu’il était quand même content de me savoir en vie, et en face de lui. Faut croire que j’avais tort. Mais bon je suis une grande fifille je vais pas chialer. Même si j’en aurais limite envie tellement…Il ne peut pas se rendre compte à quel point il est une éclaircie dans cette vie merdique. Parce que j’ai beau me la jouer warrior qui a besoin de rien ni personne, la vérité c’est que je me sens terriblement seule. Mais qu’il aille se faire foutre, je ne vais pas le supplier à genoux de rester un peu plus. J’ai ma fierté. « Et bah je ne te retiens pas. Dégage. » que je réplique froidement. Connard. Est-ce que je pourrais le laisser partir, après toutes ces années, au risque de ne plus jamais le revoir, juste par fierté ? Peut être. Mais ça serait une belle connerie.

(c) AMIANTE

ALICYA & TYBALT

Soit pas si vantarde. Je te signale que je t'ai remplacée par une mannequin. Par des mannequins. Regardez le qui se fait un malin plaisir à me le lancer en pleine gueule. Je ne l’ai pas oublié non. Je pouvais suivre ses frasques dans les tabloïds qui passaient leur temps à étaler toutes ses conquêtes. J’ai dû faire capoter quelques unes de ses relations d’ailleurs, et non je n’en ai pas honte. De toute façon si j’ai pu les atteindre c’est que clairement leur couple valait que dalle, sinon je n’aurais pas été capable de foutre la merde. De toute façon, comme si il y’avait une seule de ces filles qui m’arrivait à la cheville.   « Ah ouais, et ça a fonctionné comment pour toi ? » Pas très bien il me semble. C’était juste des femmes trophées, rien de plus. Juste destinées à faire belles à son bras. Probablement les premières à crever suite à l’apocalypse, car qu’on se le dise elles n’avaient pas l’air franchement fut fut.
Puis Tybalt semble bien désireux de prendre la poudre d’escampette. Partir loin de moi. C’est blessant. Alors forcément, même si je n’en ai pas du tout envie, par fierté,  je ne cherche pas à le retenir. Au contraire limite c’est si je ne dis pas « et bien bon débarras ». Je pense que sans sa remarque, j’aurais cherché à ce que la rencontre dure plus longtemps, mais là forcément, il me braque. Peut être espérait il du coup que je cherche à le retenir. Raté. Tiens je viens de me rappeler pourquoi ça n'avait pas marché. Il y’a tellement de raisons pour lesquelles ça n’a pas marché. « Parce que t’es un gros con ? Ouais t’as raison. » Et nullement à cause de mon caractère de merde, non non voyons. La célébrité, ça lui ait monté à la tête. Il me prenait limite de haut. Il ne supportait pas la moindre critique, même constructive. Alors que moi tout ce que je voulais, c’était sa réussite, mais je ne suis pas certaine qu’il l’ait jamais compris. Tiens je me demande comment il le vit aujourd’hui le fait de n’être plus personne. Plus de groupies collées à son cul. Plus de personne pour l’admirer, l’acclamer. Chanter ses louanges. Qu’il ait pu être un chanteur renommé, de nos jours, plus personne n’en a rien à foutre. Une carrière…ça n’existe plus maintenant. Tout ce que qu’on cherche, c’est survivre. On fait quoi ? On se tire chacun de notre côté ou t'as envie de venir ? Oh, mais c’est qu’il n’aurait pas envie finalement que je disparaisse tout de suite ? Serait il en train de faire un premier pas ? Je crois bien oui. J’apprécie. Parce que me connaissant j’aurais été capable de tourner les talons, et le regretter par la suite. Alors là, c’est une ouverture. Encore faut il que je la saisisse. « Je ne sais pas je… » ça fait longtemps que je suis seule. Faire de nouveau la route avec d’autres personnes, c’est pas évident. Surtout que si je connais son frère, je ne connais pas la troisième personne. Je me passe une main dans les cheveux, je réfléchis. « Mais c’est vrai que ça serait con de se quitter comme ça…Alors que c’était improbable qu’on se revoit un jour… » que j’avoue. Je ne crois pas au destin en règle générale, mais là… Je me dis qu’il doit y’avoir une bonne raison pour nos routes se sont croisées de nouveau. Et puis il est la première personne que je connaisse que je croise durant toutes ces années. Je peux pas tourner le dos à ça aussi rapidement. « Tu crois qu’ils m’accepteraient ? » Ils vont très certainement voir mon arrivée d’un mauvais œil non ?

(c) AMIANTE