Après sept ans de bons et loyaux services, Born ferme ses portes. Merci à tous ceux qui ont participé, d'une manière ou d'une autre, de près ou de loin, à son aventure.
After the gates of prophecies A million light years away from me Straight for the eye of destiny Reaching the point of tears. ▬ WOODKID
«Cassandra ?» une voix rauque résonna sur les murs absents de peinture. Cette dernière releva son visage de son manuel, interrompue dans sa lecture, et observa celui qui avait troublé sa tranquillité. Ce n’était pas Luke comme elle l’avait escompté, ou plutôt espéré, mais c’était un homme dont toute vivacité avait quitté le visage. Il avait intérêt à avoir une bonne excuse car Cassie commençait tout juste à comprendre la manière de résorber des hématomes intracrâniens. Celui-ci lui demanda d’aller chercher le cahier des conserves et lorsqu’il fut parti, c’est avec un soupir exaspéré qu’elle s’éclipsa de l’infirmerie. Elle avait pris connaissance que l’amie de Luke s’était trouvée une fonction dans Angel’s Camp, et elle avait appris de bien nombreuses choses en la compagnie de son assistant. Il pouvait se révéler bavard, ce qui n’était pas embêtant compte tenu de l’ennui mortel auquel Cassie aurait pu être confrontée chaque jour. Elle avait toujours un patient en charge et puis le jeune s’était incrusté dans l’infirmerie avec la volonté d’en apprendre plus. Ce qui avait réjoui Cassie au plus haut point. Bien qu’elle ne soit pas une experte en la matière, car il lui restait encore de nombreuses années d’études lorsque l’apocalypse s’était déclarée, elle se débrouillait et avait même la chance de pouvoir enseigner. Le tonnerre gronda, l’arrachant à ses réflexions, et c’est sous le ciel nuageux qu’elle se dirigea à contrecoeur vers le réfectoire, l’espoir d’en finir au plus vite.
Arrivée au réfectoire ou régnait le silence absolue, Cassie ressentit une angoisse incontrôlable. Elle qui ne supportait pas les bruits de foule et les masses, se trouvait dépossédée de toute confiance en ces lieux désertés. Cassie était perpétuellement habitée par la peur qu’un rôdeur ne l’happe sournoisement. Elle avait peur de ces mains décharnés qui empoignaient les humains, qui griffaient et qui tuaient. Une impression de pesanteur et de moiteur flottait dans l'air. On aurait dit que l'atmosphère était chargée d'électricité, dans l'attente inlassable d'un court circuit. Et c'est là qu'elle l'aperçut, assise parmi les nombreuses tables, feuilletant des magazines, seule et noyée dans l'épaisseur de ses vêtements. N'osant pas briser ce silence imperturbable, Cassandra resta dans l'obscurité, abandonnant finalement son idée de venir quémander le cahier. Elle se rappelait des propos que Luke lui avait rapporté anxieusement concernant les petits secrets qu'il partageait avec Bonnie. Cassie s'approcha doucement, se raclant la gorge afin de signifier sa présence tout en frottant ses mains contre ses bras dénudés. Elle allait devoir affronter un sujet peu amusant avec la jeune fille : celui des préservatifs. Elle se dévoila sous les néons clignotants et aperçut alors, sur le journal que lisait Bonnie, une femme svelte outrageusement maquillée. Une pile de magazines éparpillée à côté. Bonnie avait les yeux rivés sur le visage de cette image, une émotion indéchiffrable dans les yeux, son petit corps replié sur lui même. Cassie n’aurait su dire si c’était de l’anxiété, de la colère ou de la crainte. Cassandra se décida à parler, d’une voix enrouée, se remémorant ce que lui avait demandé Luke. Il lui avait fait part de ses inquiétudes quand à la probable grossesse de Bonnie et elle lui avait promis de trouver une solution. Et c’est ce qu’elle faisait.
«Bonnie, t'aurais une minute ou deux ? Je sais que ce n'est pas le moment idéal pour te parler mais à vrai dire j'étais venue chercher le cahier des conserves quand j'ai pensé qu'il y aurait deux ou trois choses que j'aurais à te dire. »
La jeune Pace redoutait avec appréhension un rejet catégorique de la part de cette dernière, son regard azuré empreint d’inquiétude. Le ciel, coléreux, se mit à gronder. Semblable à un râle inhumain ce qui glaça le coeur de la blonde. Elle se ressaisit, plantée de manière maladroite face à Bonnie, hésitant à s’asseoir à ses côtés.